Le marché, une entité déifiée...

                Le Marché est devenu un “mot-valise” dans lequel on peut mettre des réalités aussi diverses que le charmant petit marché provençal qui sent bon la lavande et la farigoulette et le marché mondial de la finance, celui que l’on a affublé d’une “main invisible” si puissante qu’elle sent l’arnaque. Peu à peu, tout est rentré dans le marché : l’information, la culture, l’éducation, la santé… Même les idées représentent un marché !

                On entre dans le marché dès la naissance par le biais de l’alimentation premier âge, des accessoires, du jouet d’éveil, de la mode… On en sort entre quatre planches ou dans une urne par le biais des pompes funèbres, avec les accessoires afférents, les cérémonies, les assurances décès, les jardins du souvenir… Les différentes étapes de la vie ne sont que des changements de marché. De sa conception à sa disparition, rien n’est possible aux humains qui ne soit en concordance avec l’état du marché. L’invention la plus utile ne sera pas possible si elle n’entre pas dans un marché ou si elle en contrarie un autre. L'invention la plus futile fera fureur sur le marché si elle promet de juteux profits.

          Le marché a pris avec le numérique une dimension telle qu'il est devenu incontrôlable, ce qui a renforcé cette stupide métaphore de "la main invisible". D'un bout à l'autre de la planète, des milliards de transactions sont effectuées au rythme de la nanoseconde: une monstrueuse efficacité entre les mains d'apprentis sorciers!

            La dimension virtuelle du marché a ouvert la virtualisation à tous les secteurs de la vie et ringardisé tout ce qui en était exclu. C'est cette logique qui entraîne la privatisation de tous les services publics. Les retraites doivent abandonner toute idée de répartition pour devenir une capitalisation individuelle. Les diverses allocations, de chômage, de logement, d'aide aux familles, etc., entravent cette main invisible et contrarie l'idéal de l'individu autoentrepreneur de sa vie....

               Nous sommes là dans une logique marchande, monétariste, qui a sa cohérence et que l'on ne peut canaliser sans remettre en cause cette logique. Le choix est donc simple: il est entre la logique du marché ou la sortie du marché, entre l'individualisation total ou la collectivité, entre l'humain ou le profit comme pôle d'attraction  de nos activités....