Le Monde d’après n’aura pas lieu !

                Découvert par hasard sur le Net, “le blog d’un odieux connard” nous prévient que le monde d’après n’aura pas lieu, contrairement à ce qui se dit avec une belle unanimité, à droite comme à gauche. Le cocotier que tout le monde voulait secouer se met à ployer sous le vent, plus fort que tout ce que nous imaginions. Et nous nous prenons à rêver, et finalement, à formuler tout haut cet espoir : et si c’était maintenant, le monde d’après ?

                Mais le monde d’après n’aura pas lieu ! Dans le monde d’après comme dans le vieux monde, la lutte des classes sera la même. Les premiers de cordée et les sans-dents vont y perdre beaucoup, sauf que cela  sera plus grave pour les sans-dents. L’un perdra son yacht, l’autre y perdra ses tongs puis sa vie… Le capitalisme n’est pas près de s’effondrer nous dit l’odieux connard avec bon sens : les riches sont une toute petite minorité alors que les pauvres sont suffisamment nombreux pour assurer la survie des riches. Soixante-dix millions de pauvres (99%) pourront toujours payer un dollar par tête de riche (1%), ne serait-ce que dans l’espoir d’être assurés d’un peu de sécurité…

                Pourtant, si les pauvres refusaient enfin de donner le moindre centime à un riche, si les travailleurs devenaient propriétaires de leur entreprise et de ses bénéfices, le capitalisme ne tiendrait pas bien longtemps. Mieux encore, si la grande masse des sans-dents s’organisait pour se passer de l’argent du capitalisme en partageant, en collaborant, en s’entraidant, en trois jours le colosse capitaliste serait à terre. Les peuples ont à leur disposition une arme redoutable mais ils ne le savent pas.

                Et s’ils ne le savent pas, c’est surtout parce que des “idiots utiles” du capitalisme font tout pour que les peuples ne sachent pas qu’ils sont puissants. Certains les font rêver d’un argent propre, d’autres d’un État honnête, d’autres encore d’une conversion des riches à la sobriété heureuse. Il suffirait que ces “élites délitées” affirment que c’est possible pour que les peuples s’aperçoivent que le rapport de force est de plus en plus en leur faveur et le serait encore plus s’ils refusaient de se servir de l’arme des riches, l’argent. Mais si les anticapitalistes, les écologistes, les décroissants qui ont les mots pour le dire ne le disent pas ouvertement, comment les peuples arriveraient à y penser ?

                Le monde d’après n’arrivera pas “parce que l’information est en panne,  parce qu’on préfère le spectacle, parce que personne n’a envie du monde d’après…” Voilà de quoi fournir une belle brochette de responsables : les médias, les clowns politiques, les riches et, ironie suprême, nous tous, sans-dents ignares et incultes, incapables de lire du Lordon ou du Friot dans le texte !

                A ma connaissance, les seuls élites ayant compris le problème sont les copains d’Anselme Jappe, lequel a enfin osé nous dire que « l’abolition de l’argent et de la valeur, de la marchandise et du travail, de l’État et du marché doit avoir lieu tout de suite, - ni comme un programme “maximaliste” ni comme une utopie, mais comme la seule forme de réalisme. » C’est clair, net et sans bavure, sauf que cette phrase vient tout à la fin d’un gros pavé intitulé “La société autophage” que le peuple ne lira pas faute d’une explication de texte.

                On peut être un odieux connard et tenter de répandre “l’idée-poison” que la puissance du capitalisme est dans l’argent, que se l’approprier revient à devenir soi-même un capitalisme, mais que l’abolir désarme les riches et émancipe les peuples. C’est techniquement possible, c’est la seule issue à l’effondrement global, mais c’est aussi ce qui fait le plus peur aux élites financières, politiques, médiatiques, intellectuelles…

                Vive les odieux Connards comme les philosophes Anselm Jappe, Benoît Bohy-Bunel, Robert Kurz, etc. (prière d’aller les voir sur Palim-Psao)