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Désargence.over-blog.com

ABÉCÉDAIRE Lettre O

1 Décembre 2019, 15:10pm

O

Objet transitionnel : objet (pouce, peluche, doudou) fortement investi par le jeune enfant et lui assurant la transition entre la première relation orale à la mère et la relation d'objet. On parle aussi d’objet contraphobique qui remplit la même fonction chez les adultes. Le sujet porteur d’une névrose phobique se rassure avec un gris-gris, une amulette, une cigarette, un objet familier qu’il a investi de pouvoir et lui permet d’affronter une situation délicate, tensiogène.

                L’argent a très souvent fonctionné comme objet transitionnel ou contraphobique mais très peu analysé comme tel. Sans doute est-ce l’omniprésence et la surévaluation sociale de l’argent qui en est cause. L’usage du mot viatique qui désigne une somme d’argent que l’on donne à quelqu’un pour un voyage était également utilisé pour le sacrement donné à une personne en danger de mort. Dans les deux cas, il s’agit bien d’un voyage, qui nécessite l’acquisition d’un pécule suffisant pour en couvrir les risques. Que l’on donne un viatique au voyageur, un pécule au jeune qui prend son envol ou que l’on place symboliquement une pièce de monnaie dans la bouche du défunt, l’argent est toujours une assurance, un objet qui limite l’angoisse de l’inconnu.

                Pas étonnant alors que l’annonce de sa disparition ait été perçue comme impossible, que la volonté de certains de l’abolir ait été jugée criminelle ! Pas étonnant que l’absence d’agent ait été si difficile à supporter par certains et que cela ait entraîné parfois des comportements pathologiques. La perte de cet objet transitionnel a réveillé des symptômes d’angoisse, des obsessions d’accumulation, des stratégies compulsives aussi nouvelles qu’incohérentes, ce qui n’a pas facilité la période de désargence...     

 

Obsolescence : Diminution de la valeur d’usage d’un bien de production due à l’usure matérielle, au progrès technique ou à l’apparition de nouveaux modèles. Dans le cadre de la recherche nécessaire de profits financiers, il était évident que la tentation de programmer cette obsolescence était trop forte pour qu’on y résiste longtemps. Quiconque se souvient un tant soit peu de l’époque monétaire sait qu’une machine à laver, une voiture, une imprimante, une ampoule électrique tombaient généralement en panne peu de temps après la fin de sa garantie. Dans tout appareil, il y avait toujours une pièce irremplaçable qui garantissait le renouvellement de l’ensemble.

                Si l’on ajoute à cela l’obsolescence d’évolution (les nouveaux modèles vantés par la publicité, les phénomènes de mode), c’était un immense gaspillage d’énergie, de temps, de travail, de matières premières qui n’avait rien à voir avec la technologie, le savoir-faire, mais uniquement avec les profits financiers, avec le marché.

                Dans le contexte actuel, l’intérêt s’est renversé, aussi bien individuellement que collectivement. Quel intérêt pourrait trouver une équipe de techniciens à fabriquer une machine moins solide que celle des voisins ? Quel intérêt la collectivité  aurait-elle à gaspiller des matières premières qui pourraient un jour manquer, à s’encombrer d’objets inutilisables, à accroître ses tâches de recyclage… ? L’obsolescence programmée qui jadis était un quasi impératif économique, serait aujourd’hui un symptôme de pathologie délirante qui serait vite recadrée par la vox populi ! 

 

Oligarchie : Il est difficile actuellement pour une jeunesse qui n’a rien connu de la société monétaire de comprendre le pouvoir de l’oligarchie et comment une petite classe de privilégiés pouvait s’imposer à tous, sans même avoir besoin de déployer une immense armée répressive. Le plus simple est de citer quelques-uns de ces oligarques, de donner quelques  exemples.

                Bernard Arnault, première fortune de France : « Les entreprises, surtout internationales, ont des moyens de plus en plus vastes et elles ont acquis, en Europe, la capacité de jouer la concurrence entre les États. L’impact réel des hommes politiques sur la vie économique d’un pays est de plus en plus limité, heureusement.» (dans La Passion Créatrice, novembre 2000).

                James A. Garfield, 20e président des Etats-Unis, assassiné en 1881 disait déjà : “Celui qui contrôle le volume de la monnaie dans notre pays est maître absolu de toute l’industrie et tout le commerce… et quand vous réalisez que le système entier est très facilement contrôlé, d’une manière ou d’une autre, par une très petite élite de puissants, vous n’aurez pas besoin qu’on vous explique comment les périodes d’inflation et de déflation apparaissent.”

                La puissance de l’oligarchie de fin du régime monétaire a été pour beaucoup rendu possible par l’anonymisation de ses membres. La plupart se cachaient derrière des marques, des noms de sociétés, des domiciliations complexes. L’employé d’une grande entreprise pouvait connaître son PDG (Président Directeur Général) qui était lui-même employé, mais rarement le ou les propriétaires de l’entreprise. Passé un certain stade de richesse, il n’était même plus possible d’en évaluer le montant réel. Cette oligarchie ne pouvait être accessible au commun des mortels : peu de résidences fixes, pas de contact possible par mail, courrier, téléphone (toujours filtrés par une équipe de sécurité), ce qui a fait dire que les membres de cette élite étaient comme des Dieux, omniprésents mais invisibles, omnipotents mais aux voies impénétrables, omniscients mais rarement partageurs !        

 

Organisations internationales : Dans l’Ancien Régime, les institutions internationales étaient aussi nombreuses que stériles. Censées résoudre les problèmes insolubles localement, elles semblaient incontournables.    L’ONU (Organisation des Nations Unis), avec son aura pacifiste et son logos en forme de colombe n’a jamais empêché la moindre guerre comme elle était censée le faire. Elle a même soutenu des “interventions” meurtrières (Irak, Syrie, Lybie…). Une curieuse procédure donnait un droit de véto à chaque grande puissance et l’opposition d’un seul État pouvait bloquer des décisions qui auraient été nécessaires, ce qui renforçait encore l’impuissance de l‘ONU (dans tout conflit, il y avait toujours l‘un des États membre à qui la guerre profitait)…

                L’UNESCO (branche de l’ONU pour l’éducation, la science et la culture) aurait pu avoir une action bénéfique dans ces domaines et sur les droits humains, mais les intérêts financiers en jeu étaient trop importants pour ne pas susciter toutes les rapines et combines.

                Les organismes financiers tels que l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), le FMI (Fond Monétaire International) ont essentiellement servi l’oligarchie responsable des désastres de la mondialisation, du néocolonialisme, du pillage des ressources par les plus gros. Le FMI a défendu jusqu’au bout ses modèles de développement économiques à base de relance et d’austérité successives, et ce en dépit de toute réalité.

                L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), au moins dans ses intentions était louable puisqu’elle veillait à la santé globale de l’humanité, luttait contre les épidémies, soutenait des projets médicaux. Mais les sinécures offertes à ses délégués, représentants, employés, ont abouti à délaisser des urgences sanitaires au profit de la préservation de ces sinécures.

                Tous ces organismes ont été une parfaite illustration du “principe de Peter” et de la perversion inéluctablement liée à l’argent. Le changement de régime a mis fin à l’utopie d’une gestion mondiale par des organismes permanents et centralisés. Les conflits d’intérêt, les enjeux de pouvoir existeront toujours, mais au moins, le système des comités de conciliation mis en place dès l’abolition des profits monétaires ont trouvé une forme d’action et d’intervention plus efficace que les anciennes instances internationales. Le simple fait que ces comités ne soient pas permanents mais dotés d’un mandat impératif pour un seul et unique conflit, qu’aucun membre ne puissent être nommé deux fois, qu’il n’y ait aucun intérêt privé à participer à une conciliation internationale sinon celui de servir et de vivre une expérience unique, a remplacé l’impuissance d’antan par une redoutable efficacité.

 

Outil neutre : L’idée d’un argent qui ne serait qu’un outil neutre a été l’argument récurrent pour s’opposer à toute désargence. “Ce n’est pas l’outil qu’il faut changer, c’est la main qui le tient“ opposait-on aux abolitionnistes ! Cet argument montrait l’incapacité à admettre que le système économique capitaliste ne s’est pas « financiarisé » par hasard ou par mauvaise volonté. Le capitalisme était structurellement spéculatif et le mythe persistant d’un capitalisme sans spéculation financière ne servait qu’à rassurer les partisans d’un capitalisme à visage humain ou moins inhumain. A cet égard, la “Gauche” ne valait pas mieux que la “Droite”.

                Le psychanalyste français Serge Viderman (1916-1991) qui a eu quelques pages étonnantes sur l’argent, fait remarquer que l’économie, et parfois la philosophie, dissertent sur la monnaie alors que la question de l’argent n’intéresse en général que les moralistes, les poètes, et les romanciers.

                Il a fallu qu’argent et monnaie disparaissent totalement pour que les gens réalisent que cet ensemble n’était qu’une marchandise, et comme tel, susceptible d’être acheté et vendu comme n’importe quelle autre marchandise. Quelques que soient les distinctions subtiles que l’on puisse concevoir entre ces deux synonymes objectifs, le résultat a toujours été le même, causer les désordres les plus cruels et mener mécaniquement l’humanité à des impasses infranchissables.  

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